La philo, on l’apprend seulement dès qu'on est ado, non ? Les enfants sont trop petits pour réfléchir si profondément… Détrompez-vous ! Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la philosophie n’est pas seulement réservée aux plus grands. Peut-être qu'on ne va pas commencer par aborder l'œuvre d'Aristote ou de Platon, mais on peut inciter les enfants à enrichir leur réflexion dès qu'ils sont capables d'avoir des conversations et de poser des questions.
Oui c’est chouette, mais pourquoi initier les enfants à la philosophie ?
La philosophie n’est pas seulement fructueuse pour apprendre à réfléchir de manière abstraite. Elle permet d’approfondir sa pensée et d’enrichir sa culture générale avec les nombreux sujets qu’on peut aborder. Elle offre également un espace où les enfants peuvent s’exprimer de manière libre, soutenir leur point de vue, construire leur argumentaire. À travers les échanges avec d’autres personnes, ils s’ouvrent aux autres et apprennent à respecter leurs idées.
Les bienfaits de la philosophie sont nombreux. On peut encore mentionner qu'elle apprend aux enfants à développer leur esprit critique et à être à l'aise avec l'ambiguïté. Après tout, la réalité est plutôt complexe et il n'existe pas vraiment de réponses tranchées aux questions qu'on se pose, non ? Finalement, la philosophie leur donne des outils pour donner sens au monde et elle leur permet de devenir plus matures.
Par ailleurs, de plus en plus d'associations et d'écoles se rendent compte de l'importance d'initier les enfants à la philosophie. C'est le cas de La Carabane, association créée par Estelle Roulin, qui propose des ateliers philosophiques adaptés aux enfants dès 5 ans. C'est aussi le cas de l'association Philocité, composée de Jean-Eudes Arnoux et de Quentin Nussbaumer, qui intervient dans les écoles auprès des enfants, des adolescents et des professeurs.
Cool. Alors par où on commence pour faire de la philo ?
1. On crée un environnement calme pour discuter
Pour pouvoir se concentrer lors de l’activité, on commence tout d'abord par éteindre la télévision. On s’assoit confortablement et on s’assure qu’on ait assez de temps pour discuter. Ce serait dommage d’interrompre une conversation intéressante parce qu’on doit manger dans 10 minutes ! On peut débattre en famille ou animer une conversation avec les amis de nos enfants... peu importe du moment que chacun se sente à l'aise et se montre respectueux.
2. On choisit des sujets de philosophie adaptés à l’âge de l’enfant
Bien évidemment pour éviter de les perdre, on ne s’attaque pas directement à des concepts abstraits comme la dualité entre le corps et l'esprit. Au lieu de ça, on choisit des sujets qui partent de situations concrètes et qui leur parlent. Sinon ils risquent très vite de nous montrer les signes d'un ennui profond. On peut se baser sur un évènement qui a eu lieu dans la journée (la naissance d'un bébé, un anniversaire, une dispute avec un camarade). Voici quelques exemples de questions.
- Naissance : D'où viennent les bébés ? Pourquoi ce sont les mamans qui portent des bébés dans le ventre ? C'est quoi la différence entre une fille et un garçon ? Et c'est quoi la ressemblance entre les deux ?
- Anniversaire : Pourquoi on fête des anniversaires à ton avis ? Est-ce que les anniversaires ça se fête avec des amis ou la famille ? Est-ce qu'on doit toujours offrir des cadeaux aux anniversaires ?
- Dispute : Pourquoi est-ce qu'on se met en colère ? Est-ce que c'est important de savoir pardonner ? Est-ce qu'on peut toujours être amis après une dispute ? C'est quoi l'amitié d'après toi ?
3. On s'inspire de l'actualité pour philosopher avec les enfants
Les informations qu'on voit à la télé, dans les journaux, sur internet, etc. regorgent des sujets potentiels à discuter avec les enfants un peu plus grands. Pour que les sujets restent pertinents et adaptés, on peut s'appuyer sur des ressources comme 1 jour 1 actu, un journal en ligne destiné pour les enfants qui propose des vidéos (1 jour 1 question) sur des thématiques actuelles. Cet exercice permettra également aux enfants de traiter activement les informations qu'on leur présente
4. On lit une histoire pour lancer un débat philosophique
Alternativement, pour donner un cadre à la discussion, on peut aussi lire des petits contes aux enfants. Ce sont de bons supports pour entamer une conversation philosophique, surtout quand il s'agit de questions morales. Pour vous donner un exemple plus concret, après avoir lu Le Petit Chaperon Rouge, on peut leur poser des questions telles que :
- Ça veut dire quoi être méchant ?
- Est-ce qu’il y a des animaux gentils et des animaux méchants ?
- Est-ce qu’il faut toujours se méfier des gens qu’on ne connait pas ?
- Est-ce qu'il existe des inconnus gentils ?
- Comment on reconnait si quelqu’un nous veut du mal ou du bien ?
- Est-ce qu’il faut toujours obéir à ses parents ?
- Est-ce que les parents peuvent avoir tort ?
5 astuces pour animer un débat philosophique avec des enfants
Pour que l’activité se déroule bien et que les enfants soient vraiment amenés à réfléchir, il est important de respecter certaines conditions.
- Tout d’abord, il est important de créer un cadre où tout le monde se fait respecter. Dès le départ, on explique clairement que la conversation sert à échanger nos opinions et que personne n’a tort ou raison, que tous les points de vue se valent du moment qu’on peut les défendre.
- S’il y a plusieurs enfants dans le groupe, il vaut mieux partager son point de vue à tour de rôle afin que personne ne se fasse couper la parole. Pour ce faire, on peut utiliser une peluche qui sert de « tour de parole » : la personne qui tient la peluche parle, les autres personnes l’écoutent.
- Ensuite, en tant qu’adulte, on évite de faire la leçon aux enfants et d’imposer notre point de vue. Le but est de favoriser le dialogue, d’inciter les enfants à parler, exprimer leur opinion, trouver des arguments.
- On pense aussi à des questions pour relancer ou approfondir la conversation. Par exemple : « Tu veux dire quoi par-là ? Tu peux me donner un exemple ? Et tu as pensé à… ? ». On reformule aussi les propos des enfants « Si j’ai bien compris, tu dis que… ».
- Finalement pour clore l'activité, on peut demander aux enfants ce qu'ils ont appris durant cette conversation, ce qu'ils en retirent, etc.